Encore une fois, grâce aux Éditions Retz, j’ai pu tester dans ma classe un de leurs nouveaux ouvrages : Narramus – Apprendre à comprendre et à raconter Le Machin ! Cet ouvrage est à destination des PS-MS, mais il en existe d’autres (et d’autres encore paraitront petit à petit) pour les MS-GS (La sieste de Moussa et La chasse au caribou) ou encore les GS-CP (Les deniers de compère Lapin).
Si ce n’est le choix des albums étudiés en fonction de leur degré de complexité (sur le plan de la syntaxe, du vocabulaire, de l’implicite), la méthodologie et les principes didactiques de cet ouvrage s’appliquent également aux autres ouvrages !
Narramus, c’est le fruit du travail de Sylvie Cèbe et Roland Goigoux que je ne vous présente plus. Je suis admirative de leurs travaux et des outils qu’ils nous proposent afin de faire avancer, autant que faire se peut, recherche et pratiques sur le terrain !
J’en parlais dans un précédent article, cette année, je me suis lancée dans la pratique du tapis d’histoire ! Et en milieu d’année, je découvrais cette nouvelle collection lancée par Retz : Narramus ! Ni une ni deux, je leur ai demandé s’ils pouvaient m’envoyer un exemplaire du volume « Le Machin » pour les PS-MS et un de « La sieste de Moussa » pour les MS-GS ! Sur la dernière période, j’ai donc pu tester avec mes élèves « Le machin » !
Voici donc un bilan de ma lecture et de ma pratique en classe :
Les principes de Narramus
Cette collection s’inscrit dans la lignée de Lectorino & Lectorinette et de Lector & Lectrix. L’objectif principal est d’apprendre à comprendre les récits écrits et de savoir les raconter.
Toute la méthode est donc organisée pour « Apprendre à raconter » :
- Mémoriser le vocabulaire
- Acquérir des tournures syntaxiques
- Retenir les idées principales
- Comprendre l’implicite du récit
Comme je le disais plus haut, la double ambition de Narramus est d’apprendre à comprendre et d’apprendre à raconter car « l’influence des compétences initiales des élèves en compréhension de textes entendus sur la qualité de leurs futurs apprentissages en lecture » est aujourd’hui démontrée par la recherche.
On est là, tout à fait en accord avec les programmes de maternelle qui soulignent : « s’exprimer dans un langage syntaxiquement correct et précis ; reformuler pour se faire mieux comprendre ; pratiquer divers usages du langage oral (raconter, décrire, évoquer, expliquer, questionner, proposer des solutions, discuter un point de vue) ; comprendre des textes écrits sans autre aide que le langage entendu« . En effet, les élèves vont apprendre « avec l’aide de l’enseignant, à utiliser le langage pour parler de ce qui n’est pas présent, évoquer des évènements passés ou des projets, explorer la compréhension d’une histoire« .
Le langage d’évocation dont il est question ci-dessus, relève d’un apprentissage explicite que Narramus permet d’orchestrer. Il permet également de créer un lien avec les familles car les enfants se voient distribuer le petit matériel pour pouvoir raconter à la maison l’histoire qu’ils ont étudiée en classe !
Ce que j’aime particulièrement, c’est les nombreux aller-retour entre chercheurs et enseignants de terrain afin de réajuster l’outil au plus près des besoins et des pratiques des enseignants !
Les fondements théoriques de la méthode
En maternelle, nous pratiquons tous la lecture offerte. Permettre aux enfants d’être en contact quotidiennement avec des histoires lues par l’adulte est important. Cependant, cette pratique en tant que telle, n’est pas suffisante. Les auteurs considèrent qu’une lecture partagée doit prévoir :
- des discussions systématiques pour favoriser un traitement en profondeur du texte étudié
- de faire réaliser des tâches cognitives de haut niveau (inférer, raconter)
- de développer le vocabulaire
Ce qui se pratique régulièrement dans les milieux favorisés est bien moins présent dans les milieux populaires. D’où l’importance de l’école maternelle pour compenser ces inégalités sociales.
Dans ce but, Narramus définit 4 cibles :
- Les compétences narratives en réception
Il s’agit de la « fabrication d’un dessin animé » ou comment créer une représentation mentale non verbale d’un récit lu. C’est pourquoi dans Narramus, le récit (lu et raconté) est systématiquement présenté AVANT l’illustration qui viendrait parasiter l’information linguistique si elle était montrée simultanément !
- Les compétences narratives en production
C’est à dire, développer le langage d’évocation. La compréhension du récit est indissociable de la mémorisation des idées du texte. Dans Narramus, elle est facilitée par les synthèses provisoires en fin de module et par l’utilisation de supports variés : tapis d’histoire, mime, théâtre.
Les auteurs soulignent l’importance de faire raconter/reformuler par un seul élève, car les évaluations menées montrent qu’à l’issue d’une restitution collective, « rares sont les élèves qui sont effectivement capables de la raconter seuls du début à la fin, sans oublier d’épisode« .
- Les compétences lexicales et syntaxiques
La recherche confirme ce que nous pressentons en tant qu’enseignants, à savoir qu’il existe une « forte relation entre la quantité de lexique et la qualité de la compréhension entendue« . Malheureusement, ces acquis sont en lien direct avec le milieu social de chaque enfant. C’est pour compenser ces différences de milieu que l’école maternelle doit mettre en place un enseignement systématique, régulier et explicite. Dans Narramus, l’enseignant définit explicitement le vocabulaire avant la lecture de l’épisode suivant. Pour mémoriser ce vocabulaire, on range dans une boite de mots (dans sa tête, la boite illustre dans ce cas la mémoire de chaque enfant, ou collectivement dans une boite qui servira de référent à la classe), le vocabulaire appris.
Boite de mots Le Machin dans laquelle on range toutes les images correspondant au vocabulaire de l’histoire
La mémorisation de vocabulaire nouveau est intrinsèquement liée à sa fréquentation, à sa mise en relation avec d’autres mots déjà connus (plus on a de vocabulaire, plus on est en capacité d’accroitre ce vocabulaire). Les auteurs insistent sur l’importance de relier un même mot à plusieurs autres de la même catégorie ou de catégories différentes. Ils conseillent également d’associer un mot de vocabulaire à un geste le représentant (dictées motrices).
- Les compétences inférentielles
La compréhension de l’implicite nécessite une capacité à « inférer des relations entre les pensées d’un personnage et ses comportements« . C’est pour cela qu’à chaque nouveau module, l’enseignant est invité à faire imaginer aux enfants ce que pense/ressent/croit le personnage !
La place du numérique dans la méthode Narramus
Un vidéo projecteur est pour moi indispensable. Bien entendu, on peut toujours essayer de contourner son absence en imprimant les illustrations sur un support A3 (ce qui demande du temps de préparation et nécessite tout de même de pouvoir imprimer en A3 et en couleur). Pouvoir projeter les illustrations, le texte, les petites animations sur un grand écran est un véritable plus, d’autant que la plupart du temps, nous travaillons en groupe classe. La projection permet donc de s’assurer de capter l’attention de tout le monde !
Mon utilisation en classe
Chaque scénario Narramus (comprendre par scénario, l’étude d’un album) est découpé en 10 modules. Comme le disent les auteurs, chaque module peut lui-même être découpé en 2 voire en 3 sous-modules. En moyenne, ils considèrent qu’un scénario Narramus représente une 20aine de moments de travail répartis sur 4 semaines.
Pour ma part, j’ai choisi de découper chaque module en 2, à raison de 2 modules par semaine :
- Jour 1 : révision/apprentissage du nouveau vocabulaire + étude de l’histoire : en groupe classe au vidéoprojecteur.
- Jour 2 : s’entrainer à raconter (tapis d’histoire, mime, théâtre) : à l’espace BCD avec l’enseignante, l’ATSEM, en autonomie.
Les enfants ont beaucoup aimé l’histoire (dont la chute les a fait beaucoup rire !), la jouer (que ce soit sur le tapis d’histoire ou avec les masques en version théâtre). Tous ont retenu les grandes idées de l’histoire, les personnages… Ils ont pris beaucoup de plaisir à jouer les scènes avec les masques (partir bouder dans la forêt, se moquer, tourner, retourner le machin dans tous les sens…) !
Cet ouvrage m’a vraiment permis de pousser encore plus loin ce que j’avais expérimenté avec mes tapis d’histoire. C’est une base didactique solide dont je me servirai pour exploiter d’autres albums : choix du type d’histoire, attention portée au vocabulaire, aux grandes idées du récit, aux personnages, possibilité de le jouer !
Narramus, c’est un outil clé en main pour travailler avec les élèves la compréhension des histoires ! Que l’on soit enseignant débutant ou expérimenté, il viendra à coup sûr enrichir votre pratique !
Voici quelques photos prises en classe :
Le tapis d’histoire (réalisé en arts avec l’ATSEM) avec les personnages à imprimer et plastifier (présents sur le CD) et une version « couture » de Bobo l’éléphant
Les masques (transformés en couronnes pour que ça soit plus facile à mettre : une bande de papier cartonné et du scratch pour adapter à la tête des enfants)
Le guide pédagogique et l’album Le Machin
Et enfin, quelques liens pour en apprendre encore plus sur cet ouvrage :
Le sommaire et le préambule de l’ouvrage
Après avoir lu le livre cet été , je suis aussi convaincue . Je vais tester avec mes GS/CP.
Bonjour,
merci, cela donne envie!! Nouvelle en maternelle et nouvelle tout court (T2), je me demandais à quelle période il serait judicieux de travailler cette méthode pour la première fois? J’ai des PS/MS à la rentrée, j’ai peur que ce soit difficile pour les PS …
Bonjour,
Je souhaiterai le faire l’année prochaine avec mes ps/ms. Du coup l’avez-vous fait cette année? A quelle période?
Bonsoir, merci !
Je me demandais s’il est possible d’utiliser la méthode quand on n’est qu’une journée par semaine dans une classe ? Ou faut-il que les lectures et séances se suivent ? Merci.
Bonjour,
Dans le cadre de mon mémoire en tant que professeur stagiaire, je fais des études sur l’outil Narramus.
Je suis à la recherche de témoignage de professeur qui ont utilisé cet outil au cours de leur apprentissage.
Pouvez-vous me joindre ? Voici mon adresse mail : Swann.kerboeuf@gmail.com
Merci d’avance,
Cordialement, Swann.
Bonjour,
Est-ce que c’est possible de le travailler avec des CP?
Bonjour, je viens passer un commentaie car je suis choquée de cette hisoire. Je trouve que cela apprend surtout aux enfants les insultes. Je pense qu’il y a certainement plein d’autres histoires qui pourraient montrer la bienveillance aux enfants. Je pense qu’un enfant de trois ans ignore ce qu’est une insulte sauf s’il l’a appris à la maison. Là, c’est lui apprendre… à l’école. J’aurais besoin d’être rassuré que chaque enseignant prenne conscience de l’impacte que peut avoir ce genre d’histoire.
L’insulte est le début de la violence.
Je fais tout ce que je peux pour apprendre aux adultes à communiquer avec bienveillance. Quand je vois ce que l’éducation nationale utilise, j’avoue que je me sens découragée.
Je vous souhaite le meilleurs, Aline
Eh bien.. je ne partage absolument pas votre avis et votre vision. Pourtant, la bienveillance est au coeur de ma pédagogie. Il n’est en aucun cas question d’apprendre aux enfants à insulter ou se moquer des autres ???
C’est au contraire l’occasion de les inviter à réfléchir sur ce que ressentent les personnages, les conséquences des paroles sur les autres ! Les enfants s’identifient facilement aux personnages parce qu’il leur est déjà arrivé plein de fois le même genre de situation « maitresse, il m’a dit « petit caca » » !
Un super support pour évoquer les mots cailloux et permettre de discuter sur d’autres façons de se parler ou de faire pour obtenir quelque chose !
Donc non, je trouve cet album génial (tout comme la méthode) !
Bonne journée.